24 avril 2006
Connaissez-vous votre empreinte écologique ?
Par Patrice van Eersel
Si le monde était égalitaire, chacun des six milliards d’humains vivant actuellement aurait droit à 1,9 ha de surface vivante, pour satisfaire ses besoins sans attaquer la biosphère. La moyenne mondiale est aujourd’hui de 2,3 ha : nous sommes donc gravement à découvert ! Mais certains beaucoup plus que d’autres : l’Européen moyen dévore 6 ha et l’Américain 12 ha, soit trente fois plus qu’un Afghan !
Au rythme où vont les choses, les calculs montrent qu’il faudrait entre deux et quatre planètes supplémentaires pour que la nôtre puisse continuer à vivre comme elle le fait aujourd’hui. L’affaire est gravissime. Il est plus qu’urgent que chacun change de vision et surtout de comportement. Depuis quelques années, la branche française du WWF, l’une des plus anciennes associations écolos du monde, tire des fusées rouges et multiplie les initiatives. Daniel Richard, son président, invite tous les réseaux verts, mais aussi humanitaires, et plus largement humanistes, éthiques ou spirituels, à interconnecter leurs démarches - les synergies sont de toute façon devenues obligatoires. L’une de des initiatives du WWF-France est de réunir des représentants de toutes les grandes religions et de les interroger sur leurs manières d’aborder les questions d’environnement. Dès la première des ces réunions, le thème majeur du WWF, présenté notamment par Thierry Thouvenot, a focalisé toutes les attentions sur une notion cruciale : l’empreinte écologique. C’est une façon de mesurer la pression qu’un être ou une communauté exerce sur la biosphère. Une approche fondamentale, dont l’application donne la chair de poule. Elle fait notamment prendre conscience que les évènements terroristes et guerriers qui secouent la planète peuvent aussi se lire de façon environnementale. L’une des lectures les plus surprenantes du nouveau mythe moderne du Boeing-percutant-la-tour-géante est d’observer les empreintes respectives de l’expéditeur et du destinataire - en l’occurrence, schématiquement, les empreintes écologiques de New York et de Kaboul.La première est la plus forte du monde. La seconde la plus faible.
Qu’est-ce que l’empreinte écologique ?
C’est un modèle mathématique “input-output” de toutes les ressources qui entrent dans un pays, ou une ville, ou une maison, ou une personne (air, eau, métaux, bois, étoffe, aliments, pétrole, électricité, etc.) et de toutes celles qui en sortent (déchets, excréments, gaz, chaleur, produits divers), puis de calculer combien d’hectares d’écosystèmes sont nécessaires pour produire ces ressources et absorber ces déchets.Les calculs pour les années 2000 sont brutaux. L’empreinte écologique la plus forte du monde est celle des USA - dont le citoyen moyen a besoin de 12 hectares pour vivre. L’empreinte la plus faible est celle de l’Afghanistan - dont le citoyen moyen a besoin de 0,4 hectare (soit 30 fois moins). Dans une “poétique nihiliste”, le plus pauvre n’ayant strictement pas les moyens de s’offrir un Boeing, il l’a donc (brutalement) renvoyé à son fabriquant. Évidemment, la réalité est plus tordue. D’abord, j’ai triché : il y a un pays (un seul) encore plus pauvre que l'Afghanistan. C’est l’Érythrée, dont l’habitant moyen a une empreinte de 0,25 ha. Et puis, à l’autre bout, deux pays ont des empreintes par habitant plus fortes que les USA : Singapour et surtout les Émirats Arabes Unis (EAU) qui, avec 16 ha, battent tous les records - une pression écologique 40 fois plus forte que pour l’Afghan moyen. Autrement dit, les cousins de Ben Laden sont les humains les plus gourmands et les plus polluants ! Mais trêve de paradoxe malin : Singapour et les EAU sont microscopiques. La nation qui en valeur absolue pose son empreinte le plus profondément dans la biosphère, c’est bel et bien l’Amérique, malgré ses immenses forêts. Et nous ? Sachant que l’empreinte planétaire viable serait d’environ 3 ha, connaissez-vous votre propre empreinte écologique ? Deux réponses possibles : statistique ou personnelle. Le Français moyen a une empreinte de 7,2 ha (1,6 fois moins que l’Américain, 8 fois plus que l’Afghan). Nous sommes, mine de rien, parmi les plus goulus des Européens - la moyenne de l’U E est de 6 ha. Mais la vraie question est plutôt : “Connaissez-vous votre empreinte écologique personnelle ?” Pour la calculer, plusieurs sites web proposent leurs services (cf. ci-dessous). La question est si grave qu’on ne peut que se secouer : il faut changer de style de vie, au moins sur un secteur clé ou à certains moments. Moyennant quoi, toutes les réactions coexistent. Au moment où nous les avons consultés pour cet article, deux des experts écologiques les plus proches de Nouvelles Clés ont réagi différemment :- Alain Mamou-Mani, fondateur de la première revue de business vert en France, aborde les choses par l’humour noir, prévoyant que la plupart d’entre nous vont assez frileusement se replier sur eux-mêmes - avec le paradoxe bien connu qu’une baisse de l’activité économique ferait chuter l’emploi, mais aussi le taux de CO2, et donc serait bon pour la planète.- Michael O’Callaghan, lui, qui travaille depuis des années sur le concept d’empreinte écologique, est plus optimiste, non sans paradoxe à son tour, puisque, contre toute attente, l’Irlande a l’une des empreintes moyennes les plus fortes d’Europe, particulièrement la ville de Dublin - mais Mike milite d’arrache-pied avec une équipe chargée d’inventer un “Dublin soutenable” pour 2015.
Quelques gestes pour réduire notre empreinte écologique
Au WWF-France, l’équipe animée par Thierry Thouvenot (qui a dirigé la rédaction de Planète Attitudes, éd. du Seuil) a sensibilisé le public français à l’impact d’un certain nombre de gestes simples de la vie quotidienne sur l’empreinte écologique d’un individu.
C’est frappant. Sachant que chaque Français “pompe” en moyenne la substance de 7,2 hectares de biosphère en un an (soit 72 000 m2), voici quelques exemples d’économie possible :
• Je remplace 5 ampoules classiques par des ampoules fluo-compactes à économie d’énergie => je réduis mon empreinte écologique de 100 m2 par an.
• Dans mes achats de nourriture, j’augmente de 50% la part de ce qui est produit localement => je réduis mon empreinte de 300 m2 par an.
• Chaque année, je remplace 5 heures de voyage en avion par le même trajet en train ou en car =>je réduis mon empreinte écologique de 1000 m2 par an.
• Chaque jour, je passe 3 minutes de moins sous la douche => je réduis mon empreinte écologique de 400 m2 par an.
• Je conduis 25 km de moins en voiture par semaine => je réduis mon empreinte de 500 m2 par an.
• Une fois par semaine, je remplace la viande que je mange habituellement au dîner par un substitut végétarien (steak de soja par exemple) => je réduis mon empreinte de 1000 m2 par an.
• 4 fois par mois, je fais sécher mon linge sur une corde au lieu d’utiliser un sèche-linge électrique => je réduis mon empreinte de 100 m2 par an.
• J’augmente de 50% la proportion de nourriture que je consomme qui n’est ni emballée, ni traitée industriellement => je réduis mon empreinte de 500 m2 par an.
• Je reporte d’un an la décision d’avoir un enfant => je réduis mon empreinte écologique de 26 000 m2 (2,6 ha) par an.
Source : www.redefiningprogress.org)
Calculer votre empreinte écologique :http://www.wwf.fr/empreinte_ecologique/http://www.agir21.org
Si le monde était égalitaire, chacun des six milliards d’humains vivant actuellement aurait droit à 1,9 ha de surface vivante, pour satisfaire ses besoins sans attaquer la biosphère. La moyenne mondiale est aujourd’hui de 2,3 ha : nous sommes donc gravement à découvert ! Mais certains beaucoup plus que d’autres : l’Européen moyen dévore 6 ha et l’Américain 12 ha, soit trente fois plus qu’un Afghan !
Au rythme où vont les choses, les calculs montrent qu’il faudrait entre deux et quatre planètes supplémentaires pour que la nôtre puisse continuer à vivre comme elle le fait aujourd’hui. L’affaire est gravissime. Il est plus qu’urgent que chacun change de vision et surtout de comportement. Depuis quelques années, la branche française du WWF, l’une des plus anciennes associations écolos du monde, tire des fusées rouges et multiplie les initiatives. Daniel Richard, son président, invite tous les réseaux verts, mais aussi humanitaires, et plus largement humanistes, éthiques ou spirituels, à interconnecter leurs démarches - les synergies sont de toute façon devenues obligatoires. L’une de des initiatives du WWF-France est de réunir des représentants de toutes les grandes religions et de les interroger sur leurs manières d’aborder les questions d’environnement. Dès la première des ces réunions, le thème majeur du WWF, présenté notamment par Thierry Thouvenot, a focalisé toutes les attentions sur une notion cruciale : l’empreinte écologique. C’est une façon de mesurer la pression qu’un être ou une communauté exerce sur la biosphère. Une approche fondamentale, dont l’application donne la chair de poule. Elle fait notamment prendre conscience que les évènements terroristes et guerriers qui secouent la planète peuvent aussi se lire de façon environnementale. L’une des lectures les plus surprenantes du nouveau mythe moderne du Boeing-percutant-la-tour-géante est d’observer les empreintes respectives de l’expéditeur et du destinataire - en l’occurrence, schématiquement, les empreintes écologiques de New York et de Kaboul.La première est la plus forte du monde. La seconde la plus faible.
Qu’est-ce que l’empreinte écologique ?
C’est un modèle mathématique “input-output” de toutes les ressources qui entrent dans un pays, ou une ville, ou une maison, ou une personne (air, eau, métaux, bois, étoffe, aliments, pétrole, électricité, etc.) et de toutes celles qui en sortent (déchets, excréments, gaz, chaleur, produits divers), puis de calculer combien d’hectares d’écosystèmes sont nécessaires pour produire ces ressources et absorber ces déchets.Les calculs pour les années 2000 sont brutaux. L’empreinte écologique la plus forte du monde est celle des USA - dont le citoyen moyen a besoin de 12 hectares pour vivre. L’empreinte la plus faible est celle de l’Afghanistan - dont le citoyen moyen a besoin de 0,4 hectare (soit 30 fois moins). Dans une “poétique nihiliste”, le plus pauvre n’ayant strictement pas les moyens de s’offrir un Boeing, il l’a donc (brutalement) renvoyé à son fabriquant. Évidemment, la réalité est plus tordue. D’abord, j’ai triché : il y a un pays (un seul) encore plus pauvre que l'Afghanistan. C’est l’Érythrée, dont l’habitant moyen a une empreinte de 0,25 ha. Et puis, à l’autre bout, deux pays ont des empreintes par habitant plus fortes que les USA : Singapour et surtout les Émirats Arabes Unis (EAU) qui, avec 16 ha, battent tous les records - une pression écologique 40 fois plus forte que pour l’Afghan moyen. Autrement dit, les cousins de Ben Laden sont les humains les plus gourmands et les plus polluants ! Mais trêve de paradoxe malin : Singapour et les EAU sont microscopiques. La nation qui en valeur absolue pose son empreinte le plus profondément dans la biosphère, c’est bel et bien l’Amérique, malgré ses immenses forêts. Et nous ? Sachant que l’empreinte planétaire viable serait d’environ 3 ha, connaissez-vous votre propre empreinte écologique ? Deux réponses possibles : statistique ou personnelle. Le Français moyen a une empreinte de 7,2 ha (1,6 fois moins que l’Américain, 8 fois plus que l’Afghan). Nous sommes, mine de rien, parmi les plus goulus des Européens - la moyenne de l’U E est de 6 ha. Mais la vraie question est plutôt : “Connaissez-vous votre empreinte écologique personnelle ?” Pour la calculer, plusieurs sites web proposent leurs services (cf. ci-dessous). La question est si grave qu’on ne peut que se secouer : il faut changer de style de vie, au moins sur un secteur clé ou à certains moments. Moyennant quoi, toutes les réactions coexistent. Au moment où nous les avons consultés pour cet article, deux des experts écologiques les plus proches de Nouvelles Clés ont réagi différemment :- Alain Mamou-Mani, fondateur de la première revue de business vert en France, aborde les choses par l’humour noir, prévoyant que la plupart d’entre nous vont assez frileusement se replier sur eux-mêmes - avec le paradoxe bien connu qu’une baisse de l’activité économique ferait chuter l’emploi, mais aussi le taux de CO2, et donc serait bon pour la planète.- Michael O’Callaghan, lui, qui travaille depuis des années sur le concept d’empreinte écologique, est plus optimiste, non sans paradoxe à son tour, puisque, contre toute attente, l’Irlande a l’une des empreintes moyennes les plus fortes d’Europe, particulièrement la ville de Dublin - mais Mike milite d’arrache-pied avec une équipe chargée d’inventer un “Dublin soutenable” pour 2015.
Quelques gestes pour réduire notre empreinte écologique
Au WWF-France, l’équipe animée par Thierry Thouvenot (qui a dirigé la rédaction de Planète Attitudes, éd. du Seuil) a sensibilisé le public français à l’impact d’un certain nombre de gestes simples de la vie quotidienne sur l’empreinte écologique d’un individu.
C’est frappant. Sachant que chaque Français “pompe” en moyenne la substance de 7,2 hectares de biosphère en un an (soit 72 000 m2), voici quelques exemples d’économie possible :
• Je remplace 5 ampoules classiques par des ampoules fluo-compactes à économie d’énergie => je réduis mon empreinte écologique de 100 m2 par an.
• Dans mes achats de nourriture, j’augmente de 50% la part de ce qui est produit localement => je réduis mon empreinte de 300 m2 par an.
• Chaque année, je remplace 5 heures de voyage en avion par le même trajet en train ou en car =>je réduis mon empreinte écologique de 1000 m2 par an.
• Chaque jour, je passe 3 minutes de moins sous la douche => je réduis mon empreinte écologique de 400 m2 par an.
• Je conduis 25 km de moins en voiture par semaine => je réduis mon empreinte de 500 m2 par an.
• Une fois par semaine, je remplace la viande que je mange habituellement au dîner par un substitut végétarien (steak de soja par exemple) => je réduis mon empreinte de 1000 m2 par an.
• 4 fois par mois, je fais sécher mon linge sur une corde au lieu d’utiliser un sèche-linge électrique => je réduis mon empreinte de 100 m2 par an.
• J’augmente de 50% la proportion de nourriture que je consomme qui n’est ni emballée, ni traitée industriellement => je réduis mon empreinte de 500 m2 par an.
• Je reporte d’un an la décision d’avoir un enfant => je réduis mon empreinte écologique de 26 000 m2 (2,6 ha) par an.
Source : www.redefiningprogress.org)
Calculer votre empreinte écologique :http://www.wwf.fr/empreinte_ecologique/http://www.agir21.org
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