02 juillet 2007

 

Nouveau Traité Européen : le patronat applaudit

Par Laurence Kalafatides (www.oulala.net)
Le 24 juin 2007

HEU-REUX ! Le MEDEF est heureux et l’a fait savoir dès samedi matin. Par un bref communiqué de presse, Laurence Parisot “salue le sens des responsabilités de l’ensemble des dirigeants européens et la détermination clairvoyante de la présidence allemande qui ont permis cet accord.” Il est vrai que ni le MEDEF, ni ses homologues européens n’auraient toléré un échec lors de la négociation d’un nouveau traité. Ils n’auraient pas non plus permit que l’on dépeça la Constitution. De fait la quasi intégralité du texte rejeté le 29 mai par 54% des français se retrouvera sous formes de “fèves” dispersées dans l’infâme millefeuille européen.

A Bruxelles, l’organisation patronale européenne Businesseurope - anciennement UNICE- soupire de contentement. Selon ses propres termes, elle “fut un participant actif de la Convention [ de 2004 -] et a toujours accompagné le processus de réforme du Traité”. Un courrier adressé le 15 juin à Angela Merkel par le Baron Ernest-Antoine Seillière, Président de Businesseurope, montre de quelle manière il entend accompagner le processus de réforme. “ La Présidence allemande à réalisée de très importants progrès ces derniers mois, et nous sommes heureux de constater que le message délivré par Businesseurope lors du 50° anniversaire du traité de Rome à été entendu” peut-on lire dans la lettre accompagnant ce qui peut-être considéré comme une feuille de route. Sur deux pages le Baron liste les points qui devront être adoptés sans discussions. Parmi ceux-ci :
- La personnalité juridique unique de l’Union
- Les principes fondamentaux de proportionnalité et de subsidiarité et rôle des parlement nationaux ainsi qu’énoncés à l’article I-11 de la Constitution
- Le Président du Conseil élu pour deux ans et demi
- Le Haut représentant de l’union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
- l’extension des domaines à majorité qualifiée
- Le renforcement du rôle des parlements nationaux
- Le statut officiel de l’Eurogroup

Cette liste n’est pas exhaustive. Un inventaire complet permet de constater que toutes les revendications de Businesseurope furent avalisées sans coup férir par les Chefs d’Etats et de gouvernements. Seule la “référence à une Union européenne hautement compétitive” donna lieu à un “psy-show” fort médiatisé. Après moult gesticulations, Nicolas Sarkozy obtint que fut biffée la mention de “concurrence libre et non faussée” dans l’article relatif aux objectifs de l’Union. Mais le Baron Seillière fut vite rassuré et le principe de concurrence non faussée fut réintroduit sous la forme d’un protocole qui sera annexé au nouveau traité. La mise en scène destinée au public français n’eut d’autre objectif que de permettre au Président de faire son jogging quotidien sur les plates bandes de la gauche dont une majorité d’électeurs s’était insurgée contre le fameux principe de concurrence. Pour le reste, rien ne vint troubler la tranquille assurance de Businesseurope. Pas même la “crise avec Varsovie”. Tout apprenti négociateur sait parfaitement que la mise en scène d’un drame est nécessaire à l’obtention d’un compromis. Ayant largement anticipé la crispation polonaise les diplomates avaient une réponse toute prête : “ Si nous étions les Allemands, nous proposerions de reporter le basculement vers le nouveau système de quelques années, disons jusqu’à 2011, et nous accepterions 2013 à la toute fin comme compromis.” La Grande Bretagne, quant à elle, est habituée à ce qu’on lui accorde les dérogations souhaitées. Elles lui furent d’autant plus facilement accordées, cette fois-ci, qu’elles permettront à Londres de faire ratifier le Traité sans devoir organiser un référendum considéré comme perdu d’avance.

Au final, il apparaît que tant le répit accordé pour la mise en oeuvre de certaines dispositions du traité, que les dérogations accordées à la Grande Bretagne ne sont que des modifications à la marge, l’essentiel du TCE ayant été préservé. Il est vrai, que plus que vingt pays réunis au sein des “amis de la Constitution” (sic) avaient averti dès le mois de janvier qu’ils n‘étaient pas disposés à se contenter d’un texte à minima.

Ce traité soit disant simplifié est une véritable escroquerie politique et l’avenir dira comment les peuples français et néerlandais réagiront à ce bras d’honneur. Pour l’heure Businesseurope peut dormir tranquille, le patronat européen sait qu’il a toujours la haute main sur la construction européenne, y compris sur l’agenda de l’Union. Anticipant la réussite du Conseil Européen, Ernest-Antoine Seillière adressa, le 8 juin, à José Socrates, premier Ministre Portugais et successeur d’Angela Merkel à la présidence de l’Union européenne, une feuille de route rappelant que la rédaction du nouveau traité dera être achevée à la fin de l’année 2007, et que celui-ci devra être ratifié par les 27 membres de l’UE, avant les élections du Parlement européen en 2009.
Ces deux dates correspondent, comme c’est curieux, aux objectifs que se sont fixés les Chefs d’Etats et de gouvernements le 23 juin.
Monsieur le Baron est servi.

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